Je suis allée à la rencontre d’Emilie Delpech. Elle est kinésithérapeute, formée par la Clinique du Coureur.
Voici un résumé de la première partie de notre rencontre où nous avons discuté des principaux problème au genou : syndrome rotulien (fémoro-patellaire), syndrome de l’essuie-glace et tendinopathie.
Découvrez aussi les fausses croyances autour des douleurs au genou et les dernières avancées scientifiques.
Qu’est-ce-que la Clinique du coureur ?
La Clinique du coureur est un organisme de formation canadien pour les professionnels de santé.
Ils forment sur la prévention des blessures en course à pied et ils cherchent à promouvoir le sport pour la santé.
Le regard d’Emilie en tant que kinée sur la Clinique du coureur.
Aline : Pourquoi t’es-tu formée avec la clinique du coureur ?
Emilie : J’aime le côté scientifique de La Clinique du coureur car ils s’appuient sur la littérature scientifique, quitte à casser certaines croyances.
Les connaissances changent, donc il faut évoluer dans les conseils que l’on donne.
Et puis cela m’a permis de me spécialiser.
La Clinique du coureur insiste sur la quantification du stress mécanique , c’est-à-dire sur comprendre comment un tissu répond à une contrainte . L’objectif est de trouver le bon dosage pour créer des adaptations tissulaires. Appliquer des contraintes pour progresser et améliorer la fonction sans aggraver la douleur.
Aline : Il y a t il des aspects de la Clinique du coureur avec lesquels tu n’es pas d’accord ?
Emilie : Pour l’instant, non. Mais je ne me suis pas encore fait un avis sur tout. Je suis encore pas mal en observation. Par contre, je suis plus en nuance, moins catégorique qu’eux.
Comment soigner au mieux un syndrome fémoro-patellaire, un problème au genou très courant ?
Aline : Quels sont tes conseils en tant que kinésithérapeute pour les cas de syndrome fémoro-patellaire ?
Emilie : Tout d’abord, le syndrome fémoro-patellaire correspond à une douleur péri ou rétro patellaire accentuée par au moins une activité de mise en charge avec le genou fléchi.
En fait, c’est un problème dû à une charge excessive lors d’une activité dépassant la capacité maximale des tissus à tolérer le stress mécanique.
Les deux choses les plus importantes, c’est le renforcement musculaire et la quantification du stress mécanique.
Il faut donc aider les tissus à s’adapter et à augmenter leur capacité à tolérer le stress.
La difficulté, c’est de gérer la contrainte de ce que l’on va demander. Pour les sportifs en bonne santé, c’est moins compliqué . Mais pour les personnes en moins bonne santé, qui ont une douleur, c’est plus délicat. Un effort qui peut paraître anodin sera parfois déjà beaucoup pour la personne. Pour certains, juste marcher 10 minutes, c’est déjà très bien. Mais ce n’est pas toujours facile à accepter.
Les personnes doivent commencent à un niveau facile. Faire peu, mais souvent. On a moins de risque de se faire mal en commençant à un niveau facile et en augmentant au fur et à mesure.
Souvent au début, je commence par des flexions du genou sans contrainte, en étant allongé sur le dos. Et du vélo. Pour se muscler et lubrifier l’articulation, la mettre en mouvement.
Et si ça va, ensuite, on peut aller plus loin en travaillant debout, puis sur une jambe…
Il ne faut pas aller dans la douleur, mais s’arrêter juste avant d’avoir mal.
Les patients doivent éviter de prendre des escaliers ou des descentes au début, le temps que la douleur passe. Je propose aussi des exercices d’équilibre et de proprioception.
Un syndrome fémoro-patellaire est souvent très long à soigner.
Comment soigner au mieux un syndrome de l’essuie-glace, un autre problème au genou fréquent ?
Aline : Il existe un autre problème courant au genou. Que conseilles-tu pour les personnes qui ont un syndrome de l’essuie-glace ?
Emilie : Là c’est un peu différent. Le syndrome de l’essuie-glace est dû à un frottement répété. En fait, ce n’est pas un problème de charge comme le syndrome fémoro-patellaire.
Ce sont souvent des coureurs ou des cyclistes qui sont touchés. Car ils y sont allés trop fort. Ou ils ont fait leur entraînement habituel, mais un jour où ils étaient fatigués. Parfois ils ont changé de surface d’entraînement ( terrain varié, dénivelés…). Ce peut aussi être des cyclistes qui sont passé aux pédales automatiques…
Dans ce cas, comme kinée, je propose des étirements et un travail en alternant la course et la marche.
L’idée est de reprendre l’entraînement très progressivement, sans jamais aller dans la douleur.
Au départ, il faut éviter de faire du dénivelé. Et j’ajoute un travail sur la foulée et parfois je conseille de changer de chaussures.
Les conseils d’une kinée pour les tendinopathies et l’hydratation.
Aline : Certaines personnes ont des tendinopathies au genou. Peux-tu nous donner ton avis sur ces problèmes au genou en tant que kiné ?
Emilie : Les tendons réagissent à la tension. Dans les tendinopathies, la capacité maximale du tendon à tolérer une certaine tension a été dépassée.
Contrairement à ce que l’on pense, il n’y a pas d’inflammation donc les anti inflammatoires sont inefficaces dans ce cas de problème au genou. Et aujourd’hui les scientifiques spécialistes de la tendinopathie ne savent pas quelles sont les sources nociceptives qui sont responsables de la douleur!
En premier lieu, il faut prendre 3 ou 4 jours de repos, puis reprendre progressivement ses activités quotidiennes habituelles.
Pour la reprise sportive il faudra quantifier le stress appliqué sur le tendon, faire du renforcement excentrique et des étirements.
On tolère un peu plus de douleur en mouvement pour ce problème au genou que pour le syndrome de l’essuie-glace ou le syndrome fémoro-patellaire. On peut aller jusqu’à une douleur de 3/10.
Malheureusement, certaines tendinopathies sont plus difficiles à soigner.
C’est souvent le cas quand les personnes prennent des médicaments qui peuvent les rendre sensibles à cette pathologie. Comme par exemple les corticoïdes, certains antibiotiques (fluoroquinolone) ou les anticholestérols.
Et puis il y a parfois de fausses tendinopathies qui sont en fait des « sciatiques » et pas un vrai problème au genou. Les personnes ont un point douloureux qui font penser à ça, alors qu’en fait la source de la douleur provient du dos.
Il y a aussi de fortes croyances. Aujourd’hui aucune étude n’a encore prouvé de lien entre hydratation et tendinopathie ainsi qu’entre tendinopathie et problème dentaire.
Aline : Ça alors ! J’ai toujours entendu dire que la déshydratation favorise les tendinopathies. Et personnellement, je crois que toutes les fois où j’en ai eu une, c’était quand j’avais fait un effort par forte chaleur.
Emilie : Il n’y a pas de preuve scientifique entre manque d’hydratation et tendinopathie, le lien n’est pour l’instant pas prouvé .
Le problème, c’est que l’on a tellement entendu dire ça que parfois des sportifs sont en hyperhydratation. Des études ont montré que certains coureurs pouvaient prendre du poids lors d’un marathon, alors qu’il est normal de perdre 4 kg voire 10 kg à la fin d’une épreuve de ce type. Cela veut dire que ces coureurs sont trop hydratés. Or c’est très dangereux pour la santé, encore plus que la déshydratation.
Aline : Comment connaître la bonne quantité d’eau à boire alors ?
Emilie : La Clinique du coureur conseille de simplement boire à sa soif.
Les conseils d’Emilie pour ne pas avoir mal au genou en course à pied :
Retrouvez la suite de cet interview pendant lequel Emilie parle de course à pied, foulée, chaussures minimalistes, organisation des entraînements, erreurs fréquentes des coureurs…
L’œil du spécialiste. Emilie : Comment courir sans se faire mal au genou.
Rédigé par Aline Garnier :
Je suis coach sportif spécialisée dans les douleurs chroniques aux genoux.
J’écris mes articles en m’appuyant sur :
– Mes expériences personnelles.
– Les questions que vous me posez.
– Mes découvertes sur d’autres médias.
– La lecture d’études scientifiques.
Rappel : Je ne suis pas médecin et ce blog n’a pas vocation à remplacer un avis médical.